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 Sujet du message: Dernier regard
MessagePublié: Ven 10 Mars, 2006 22:07 
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Dernier regard

« Encore cette fois je n’y suis pas arrivé », prononçais-je. Je voyais au fond de la chope de bois le reflet de mes sourcils grisonnant qui ne faisaient que renforcer mes traits marqués par les années. Je souriais : tout compte fait, je me reconnaissais mieux dans cette pinte en bois rafistolé qui n’était même plus étanche que dans le plus beau des miroirs, même celui du commandant. Je finis en une dernière rasade le contenu qui me laissa un goût amer au fond de la gorge, avant que le liquide liquoreux ne se soit entièrement vidé sur la terre battue de la taverne.

Je relevai la tête pour regarder mes compagnons, ou plutôt, ce qu'il en restait. Cela faisait maintenant longtemps, trop pour se rappeler du jour de mon départ de ma petite maison du nord. En fait, je ne me souviens que des rayons de soleil dans brise matinale de ce jour qui avait changé sa vie. Non, du jour à partir duquel je n’arrivais plus à se perdre dans le réconfort de l’inconscience de l’alcool. Mes camarades n’avaient pas ce genre de soucis et ne s’en souciaient plus maintenant qu’ils étaient dormaient bruyamment des tabourets d’où ils étaient tombés. Je reposai ma pinte sur les innombrables auréoles de la table de chêne, seuls témoins des voyageurs qui abondaient il n’y a pas si longtemps dans cette région.

Il régnait un étrange silence : je n’entendais aucunes voix, pas un rire ni un pleur. On avait presque finit par s’y habituer à cette sinistre région. Aujourd’hui, les gens ne venaient plus partager un verre après le service mais pour oublier le prochain. J’attrapais la porte en soupirant, ou plutôt : elle me tint debout alors que ce tapis bien trop épais me faisais trébucher. Décidément, mon corps ne me réponds plus : il est vraiment temps de prendre un peu de repos. En poussant la lourde planche qui tenait à peine sur ces gonds, l’air frais de la nuit me saisi et me réveilla, un peu. Le calme de ces heures contrastait avec l’activité du jour. J’aimais parcourir la nuit le camp en faisant semblant de me balader parmi les forêts de tentes, j’avais presque l’impression de ne plus percevoir les écussons et les armes déposées devant ces tentes de fortunes.

Lorsque je rejoignis mon petit pied à terre, le matin pointait à l’horizon et les plus matinaux des hommes d’armes commençaient à s’éveiller. Qu’importe, j’avais encore une heure ou deux de répit avant que mon chef ne vienne me tirer de ma couchette. Je mis plus de temps à me frayer un chemin pour contourner ma caisse de soldat que pour m’endormir. Je me disais des fois que je venais juste d’arriver ici. Pourtant, l’étalage d’objets aussi divers qu’inutile devant moi venait me contredire. Le temps ne nous fait pas seulement accumuler des objets témoins de nos souvenirs, mais il nous enferme dedans. Sur cette pensée trop sérieuse pour mon état, je décidais de mettre un peu d’ordre dans ce chaos désordonné. Ou plutôt l’inverse. Grâce à des gestes aussi souples que réfléchis, je renversais les quelques objets sur ma malle en tentant d’atteindre mon lit de fortune.



« Je t’ai eu ! » prononçais-je d’une voix pâteuse lorsque j’attrapais le filet qui me permettait de dormir ailleurs que sur des planches de bois. J’étais déjà bien chanceux d’avoir ces quelques fils, peu ici peuvent s’en vanter. Pendant que je m’allongeais, mes yeux qui me paraissaient déjà si lourds achevaient de se fermer sans ma permission.

J e sentais un mince ruban s’échapper de mon poignet. Je le regardais intrigué, car je n’ai jamais eu ce genre d’ornements sur moi. C’est étrange, mais j’avais l’impression que ça me manquait. Je plissais les paupières pour distinguer où était tomber ce ruban entre les herbes. Je scrutais ainsi le sol depuis quelques instants lorsqu’elle me parla : j’entendis sa douce voix dans mon dos. Je me retournais pour lui faire face. Avant que je ne la vois, un vent m’emporta loin lors de ces années où je la voyais encore.
J’essayais de l’imaginer, mais je ne voyais que ses cheveux, ses longs cheveux noirs. Je n’arrivais à pas la décrire. J’étais comme ébloui. Je ne savais comment exprimer en mots ce qu'elle était pour moi, je n'en étais même pas certain. Que signifiait donc ce silence qui me prenait?

Quelques paroles me parvinrent, je n’entendais qu’à peine les mots : je lisais sur ces lèvres ce que mon ouïe ne pouvait reconstituer tellement j’étais absorbé par cette vision.
« Ton ruban » prononça-t-elle. Je tendais la main pour l’attraper, pour essayer de l’étreindre une dernière ou une première fois, je ne savais plus. Sur cette image figée dans mon esprit, j’ouvrais les yeux. Je prononçais « Encore cette fois je n’y suis pas arrivé ».

« Il va voir s’il n’y arrive pas ! » entendis-je. Cette désagréable voix ressemblait fort à celle de mon sergent. Un coup méticuleusement calculé pour n’être « que » douloureux dans mes hanches acheva de confirmer ma réflexion. D’autres jurons finirent de me rappeler le caractère exécrable de cet officier. Je me levais avec peine encore courbaturé de cette courte nuit. Les premiers sons des soldats qui se réveillent me parvenaient déjà. D’ailleurs, je jetais un coup d’œil au dehors pour constater que le soleil ne c’était pas encore levé. Je me tournais vers mon supérieur d’un œil interrogateur. J’avais appris au moins cela : lui tenir tête ne servirait pas à grand-chose : rien n’était plus précaire qu’un poste d’officier ces derniers temps. Au lieu de me lancer une de ses remarques bien cinglantes, il se détourna et sortit de ma tente.

Je prenais quelques instants pour faire un brin de toilette et m’équiper convenablement, si ce mot avait encore un sens ici bas. Avant de sortir à mon tour, je me retournais : j’avais l’impression d’avoir oublier quelque chose. C’est alors que j’aperçu un morceau d’un fin tissu rouge dépasser de mon coffre.
« Monseigneur-le-Dandy est-il enfin prêt ? » entendis-je dans mon dos. Je me retournais machinalement pour faire face à mon sergent. « Trop tard » pensais-je, je ne pouvais plus revenir examiner ce curieux tissu. « Je reviendrais » ajoutais-je en sortant de la tente.



Toute la section était déjà là, c’était étrange. Je rejoignais à pas lents la ligne déjà formée à coté de moi. Je n’eu pas beaucoup de chemin à parcourir. Je me rangeais aux côtés de « Cheveux Hirsutes », je ne savais toujours pas son nom. Ce n’était pourtant pas faute d’essayer. Je ne savais pas pourquoi je n’y arrivais pas, je le connaissais pourtant presque bien : la haine que semblait nous porter tout particulièrement notre adorable supérieur nous avait un peu rapprocher. Toutes les pires corvées nous étaient réservées, nous ne savions pourquoi. Je sentis un coup de coude qui me tira de cette pensée. Je tournais prudent la tête en comprenant que Cheveux Hirsutes m’avait averti car notre servent m’aurait incendié s’il voyait mon regard dévier et se perdre.

Puis je me souvins maintenant pourquoi « chef » était si nerveux ce matin : c’était donc aujourd’hui le début de « l’Opération ». Tous disaient que c’était pour bientôt, mais personne ne savait exactement quand. Je me sentis soudain compatissant pour la pire des crapules, qui n’avait que quelques galons de plus que moi et qui tentait de donner une allure respectable à ces recrues qui croyaient encore que tenir une épée faisait d’eux des soldats lors de la visite de notre chef de guerre.
Instant de compassion qui disparut lorsqu’il me regarda et me donna l’ordre de remettre en place les tentes de toute l’unité. J’avais déjà passé des jours à tenter de planter droit un piquet dans ce sol sablonneux sans succès. C’est comme si même cette terre ne voulait pas de nous. Je m’exécutais tout de même.

Le reste de la matinée ne fut guère passionnante : entre deux corvées, je tentais de revenir à ma tente : mais j’étais toujours interrompu avant d’y parvenir. Il m’avait à l’œil aujourd’hui ce sergent. Je manquais même la visite de notre général : je me retrouvais envoyé à l’extérieur du campement pour d’obscures corvées de bois. Lorsque je revins chargé autant que je pouvais l’être, mon supérieur fondit sur moi l’œil mauvais en criant plus qu’en articulant pour m’ordonner de laisser tomber mes jouets et rejoindre le reste de la section pour partir de suite en reconnaissance devant l’armée.

C’était donc ça sa promotion du jour : il allait devoir diriger ceux qui avaient une chance sur deux de tomber dans une embuscade avant de pouvoir appeler de l’aide. Il fallait toujours qu’un petit groupe précède les pas de l’armée pour détecter les derniers pièges et guet-apens. Et j’allais l’accompagner dans cette sombre danse avec la mort. « Adieu, étrange Ruban » pensais-je en rejoignant mes compagnons. Je ne savais pas si je vivrais assez longtemps pour revenir à mon coffre.



Nous marchions depuis longtemps avec mon unité en reconnaissance de notre armée. Depuis le début de cette guerre, on m'avait engagé dans les rangs d'une division que je ne connaissais pas. Cela faisait bien trop longtemps. Nous portions les couleurs violettes argentées sur nos épaulières, symbole de notre foi et honneur, mais beaucoup avaient le courage encore plus émoussé que leur lame.

Mon voisin avait commencé à faire pousser ses cheveux, sa coupe était constamment en bataille, mais il en avait assez de les couper. Il en avait bien assez de beaucoup de choses, par moment, il me disait qu'il avait perdu foi en l'avenir: il ne croyait pas en grand chose sauf en ce que le futur pouvait lui apporter. Pourtant, même cette flamme semblait vaciller ces derniers temps. Ces yeux avaient perdu cette lueur qui le rendait rêveur. Il était devenu songeur.

Sa tenue n'était guère différente de la mienne, une tunique trop souvent recousue recouvrait une côte de maille qui faisait presque parti de nous dorénavant. Quand il m'arrivais de faire quelques pas sans, j'avais l'impression qu'il me manquait quelque chose, comme un poids aux épaules qui aurait disparu. Cette pression était devenue rassurante au fil des marches et des combats.

L'air était lourd et le respirer ne m'aidait pas à reprendre haleine, j'avais l'impression d'étouffer sans rien pouvoir y faire. C'est dans ces moments que je repense aux champs qui bordaient autrefois ma maison. Je n'y faisais jamais attention, tout me semblait si immuable. Mais la réalité est venue me réveiller ce matin là d'automne.

"En postions et tenez-vous prêt!" prononça notre sergent: une rangée d'arbre venait rompre la monotonie de notre marche, et surtout me sortait de ma nostalgie. Je ne pu m'empêcher de sourire devant cet avertissement aussi dénué de sens qu'évident. Je m'exécutais cependant en protégeant le flan gauche de notre unité. Je penchais la tête pour scruter ces arbres. Ils étaient suffisamment denses pour ne pas laisser passer un rayon de lumière et les branches basses allaient donner du fil à retordre à quiconque tenteraient de traverser cette sorte de haie. Elle dominait la plaine marécageuse que nous venions de traverser de la hauteur de nos plus grandes lances.

Tout compte fait, il n'y avait rien d'anormal. Mais une étrange pensée me vint: que faisait ces arbres plantés au milieu d'une prairie abandonnée de tous et même des dieux créateurs. Tout ce que j'avais traversé jusque là semblait dévasté et respirait la mort, alors pourquoi on trouvait quelque chose de normal ici?

Le geste de mon chef me sorti de mes réflexions en me pointant du doigt "Toi, traverse ces arbustes et revient me faire ton rapport". Je sursautais sur place tandis que je serrais un peu plus fort la garde de mon épée. Traverser cette barrière que la nature semblait avoir posée ne me disait rien du tout, je commençais à me lever quand cheveux hirsutes me dépassa se dirigeant vers les arbres. J'étais soulagé qu'il aille mal compris qui le sergent avait indiqué, car j'avais vu clairement ces yeux sous son heaume, mais je me demandais ce que ce dernier allait dire. Rien.

Mon compagnon commençait déjà à disparaître sans un mot derrières les premières branches. Seul mon sergent savait que je m'étais dégonflé, mais cela m'importait peu: trop de recrues étaient mortes inutilement en voulant démontrer leur bravoure aux yeux de tous. Une guerre ne laisse pas de place à la chance ni à l'héroïsme. On nous montrait toujours ces quelques figures emblématiques, ces guerriers hors du commun ou ces étranges mages, mais ils faisaient partis d'un autre monde. Le notre n'accordait que la mort aux imprudents, règle absolue et immuable.



"Si je m'attendais à ça..." c'était une voix qui venait des arbres, je mis un instant pour comprendre que c'était notre éclaireur. Je le connais donc si peu pour ne pas reconnaître le timbre de sa voix? Puis plus rien. Tandis que les secondes commençaient à peser lourdement, le sergent me regardai de nouveau en prononçant lentement pour qu'il n'y ai aucuns doutes "Maintenant, vas-y!". Bon, finalement tout le monde savait que j'avais laissé passer mon tour la première fois. J'avais un goût amer dans la gorge même si le regard de mes compagnons m'importait peu. J'arrivais à pas lourd devant le mur végétal et pris mon courage à deux mains en baissant la tête pour éviter les premières branches.

Je fermai les yeux pour me protéger d'une branche que j'avais laissé échapper et qui arrivait tel un fouet sur mon visage. Une seconde plus tard, je n'avais toujours pas senti la brûlure du choc sur ma peau, j'ouvrais avec méfiance les yeux pour voir où le danger était parti.

C'est ainsi que je pénétrais dans une prairie qui semblait hors du temps. Place onirique parmi le décor ravagé d'une région ayant trop longtemps vécue la guerre. Alors que l'hiver cédait difficilement devant de printemps, il semblait qu'on était au coeur de l'été. Les hautes herbes verdoyantes ondulaient sous un soleil qui réchauffait nos visages et nos coeurs. Seule une fraîche brise nous rappelait l'époque de l'année, mais au lieu de me glacer, elle me rafraîchissait agréablement tel une fine pluie lors d'une chaude journée de fin d'été. Un étrange parfum venait de fleurs éparses qui complétaient la féerie du lieu.

Je vacillais en m'arrêtant devant ce spectacle qui occupait tous mes sens, pourtant, je ne savais comment décrire ce que je voyais. Dans un instant de lucidité, je criais "Venez!", mais le son que je produisis me fit presque mal aux oreilles, j'avais eu peur de briser l'harmonie de ce lieu. Je ne faisais déjà plus attention aux bruits qu’ils produisaient en traversant la haie.

Plus qu'une image d'un souvenir mon coeur s'est imprégné du lieu, ou plutôt, cette place l'a pris pour ne plus desserrer son étreinte passionnée. J'avais l'impression d'avoir déjà vécu cette sensation, mais je n'arrivais à le retrouver. Je regardais mes compagnons de marche, tous semblaient avoir succombés au même sort, nous marchions lentement en essayant de ne pas abîmer cette terre sous nos pas. Nous montions un petit versant dont on ne distinguait rien au delà de la crête, à peine une dizaine de mètres devant nous.

Je ne sais toujours pas ce qu'un tel lieu faisait là, peut-être est-ce le jardin secret que nous cultivons tous dans notre coeur que mes camardes et moi avons du traverser, je ne sais pas. Il y a des mystères dans ce monde plus secret encore que la magie qui l'a créé. Juste avant de parvenir au sommet de la petite colline, je me retournais pour admirer une fois encore cet étrange paysage, j'avais l'impression que je ne le reverrais jamais. Je ne savais pas encore à quel point j'avais raison.



Arrivé en haut, je contemplais une immense pleine rocheuse recouverte de quelques herbes. Le soleil commençait déjà à se coucher à l'horizon devant nous, caché derrière des nuages, il projetait sur nous des rayons éparts qui n'avaient plus rien de réchauffant. Je sentais le sol vibrer sous les pas de l'armée qui nous suivait. Non, pas exactement: les premiers étendards pointaient loin devant nous, rouge et or, couleurs des ennemis que nous devions affronter.

En un instant, la ligne de l'horizon fut brisée et dans la pénombre du soir, on ne pouvait plus distinguer les soldats du paysage. Ce décor merveilleux que nous venions de traverser avait laissé place à une vision cauchemardesque du monde, s'éteignant un soir de fin d'hiver. Mon compagnon me fit face:
"Il est l'heure, nous devons presser nos frères" me dit-il. Je le regardais un instant me demandant s'il était bien utile d'affronter ici plutôt qu'ailleurs cette armée qui était bien plus nombreuse que la notre.

"Je sais bien, sonnons le cor du rassemblement." C'est ainsi que notre petit groupe de six prîmes chacun les longs cors posés sur nos dos. Chacun prenant son inspiration, je commençais à souffler dans le puissant instrument. Un son long et monotone s'éleva dans l'air, bientôt rejoint pas d'autres notes à peine plus aigus. C'est un étrange concert que nous donnions, le son faisait vibrer nos corps, trembler nos âmes. Durant un instant, nous avions l'impression de détenir une puissante magie qui nous rendait plus puissant que jamais. Déjà, le sol commençait à résonner lui aussi, répondant à notre appel, même la terre semblait vibrer de toute son âme.

Je reposais l'instrument sur ma poitrine, mais la vibration continuait. Je ne tardais pas à comprendre pourquoi tout semblait entrer en résonance, les cris de nos soldats perçaient déjà derrière nous. Accourant de partout, ils envahissaient notre champ de vision ne laissant que la vue de nos adversaires. Ce paisible champ avait définitivement disparut.

A ce moment, je croyais que nous pouvions encore gagner, mais gagner quoi? Nous avions tant marché pour rencontrer notre destiné, si elle ne devait pas finir ici: il y aurait une autre sanglante bataille, d'autres couchers de soleils, d'autres cris dans le fracas étourdissant des armes. Mon unité prenait sa place dans notre armée, tandis que ceux que nous désignons comme ennemis faisaient de même. Les mouvements lents de ces deux masses de soldats étaient un étrange ballet, chacun faisant face à l'autre. Je n'avais jamais vu autant de personnes rassemblées en un même lieu. Cette soirée allait être épique, immense boucherie montrant une fois de plus comment nos techniques pour ôter la vie ne cessaient de s'améliorer.

Ma courte dague avait laissé place à une longue épée marquée de runes. Je la sortais de son fourreau et passais ma paume sur les symboles: je voyais déjà les symboles s'illuminer quand ma main passait. C'est étrange comment une telle chose peut paraître magnifique, à ce moment, je ne voyais que cette épée brûlant des milles feux, beauté mortelle qui frappait quiconque effleurai le tranchant de la lame. C’était le seul objet de valeur que je possédais, même si e n’était pas la plus importante mes yeux.

C'est l'épée à la main que je vis nos officiers traverser les rangs sur leurs montures nous donner les derniers ordres, ordres bien inutile lorsqu'on a déjà vécu le chaos d'une telle bataille. Les coeurs s'enflamment, les âmes s'oublient, les yeux brillent d'une lueur effrayante lorsqu'on perce le regard de nos ennemis. Il devient difficile de réfléchir dans ce déluge de passions, on ne devient plus que les pantins de nous même possédés par le démon de la guerre.



« Tu parles d’une Opération… » murmura mon sergent plus pour lui-même qu’à mon attention. Je devais bien admettre que j’étais bien d’accord. Nous nous mîmes ainsi en marche, d'un pas lent sous nos lourdes armures et armes brandies. Ce pas régulier maintient encore les formations pour encore quelques instants, en face, je voyais que nos adversaires en faire de même. Ils semblent sortir des collines sans jamais discontinuer. L'horizon est devenu noir de soldats, il devient maintenant difficile de distinguer les ombres des silhouettes. Le soleil se couchait en projetant ces rayons rouges semble annoncer le massacre auquel j'allais participer.

Lors de ces moments, il ne faut penser à rien, surtout pas à l'avenir de ceux qui forment la première ligne, comme mon unité. Je sens mes mains se crisper sur la garde de mon épée. A travers les gants en mailles de fer, la sueur moite est désagréable car elle donne l'impression de laisser glisser mon arme. Elle est mon unique espoir, car il faut la tenir à deux mains pour guider cette longue lame lors des duels, je ne peux m'encombrer d'un bouclier qui va voler en éclat lors de la charge que nous allions effectuer.

Le rythme augmenta, on avance maintenant au petit trot et les rangs commencent déjà à perdre de leur continuité, signe du chaos qui va bientôt régner. C'est étrange, mais je ne sens plus mes jambes, elles semblent s'animer d'elles même alors qu'elles n'ont cessées de m'élancer depuis des heures. Ce n'est pas que je n'entends plus mes compagnons crier pour se donner du courage, mais je n'écoute déjà plus. Seul une mélodie confuse me parvient encore, j'ai l'impression que le vent siffle dans mes oreilles.

Et je repense à ce champ que j'avais vu quelques minutes plus tôt, il me semblait déjà perdus dans des souvenirs lointains, tout comme ce sourire que je n'ai revu depuis trop longtemps. Quelques flocons commencent à tomber du ciel, plus obscurcit par les flèches en quête de cibles que de nuages, me frappait doucement le visage. Je me souvins alors de cette soirée d'hiver où je l'avais revue pour la dernière fois.
C'est une sorte d'euphorie dans laquelle je me perds. J'essaie de l'explorer pour la comprendre, je me retrouve devant cette auberge à l'heure des adieux avec mes anciens camarades à la regarder, Elle. Je ne sais pas quoi faire, ou plutôt ce que je devrais faire. Se retrouver si proche et ne rien pouvoir dire : pourquoi les mots me manquent ? Pourquoi je ne suis pas capable de lui dire. Mais dire quoi ? Lorsque je me détourne le regard, je vois que mes pas s'allongent pour aller au pas de charge accompagnant mes frères dans une mêlé dénuée espoirs.

Je distingue déjà l'éclat des lames et des lances du rang me faisant face, dans les casques, les yeux de l’homme que je fixe. Tout me semble aller au ralenti, ou en accéléré, je ne sais plus. Je perçois dans ces yeux plus d'abandon que de courage. Mais ? N'est-ce pas mes propres yeux que j'observe? C'est une scène surréaliste à laquelle j'assiste plus spectateur qu'acteur, voyant les muscles des mâchoires se crisper pour préparer le choc, les armes s'orienter vers d’improbables ennemis que j'arrive plus à distinguer. Cette poussière qui se lève cache ma vue du reste de la bataille. Je me retrouve dans un monde clos, où seul les yeux de mon adversaire compte. Le temps semble s'écouler différemment, mon univers réduit à ce regard. Je ne sais plus qui je suis, pourquoi je suis là. Ca n’a plus d’importance, cela n’en a jamais eu.

Il verse une larme, une larme qui perle sur ma joue. Dans ces yeux, je la revois. Je la regarde et je pense: "Plus jamais je ne reverrais ces cheveux aux reflets de feu."
Je ferme les yeux une dernière fois mais j’ai l’impression de me réveiller pour la toute première fois. Et j’ajoute :


« Je veux vivre ! Je veux te le dire. »


Dernière édition par Azral le Sam 11 Mars, 2006 14:45, édité 2 fois au total.

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MessagePublié: Ven 10 Mars, 2006 23:46 
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Inscrit le: Mer 22 Fév, 2006 21:14
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De jolies tournures de phrase, des descriptions plutot longues et relativement aisées à lire. J'aime beaucoup.
Ce n'est pas un background, à quoi correspond ce texte dans la vie du perso? Y aua-t-il une suite?
Par contre, quelques petites coquilles au début dues aux corrections apportées :


Citer:
Mes camarades n’avaient pas ce genre de soucis et ne s’en souciaient plus maintenant qu’ils étaient dormaient bruyamment des tabourets d’où ils étaient tombés.

broque

qui n’était même plus étanche que dans le plus beau des miroirs, même celui du commandant


Pas d'autres commentaires si ce n'est que forcément la longueur du texte va en rebuter beaucoup...
Bravo encore

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Oubliez-moi, je vous en conjure. Si vous ne le faites pas pour vous, faites-le pour moi.
Hellismine, troll né du Khaos
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MessagePublié: Sam 11 Mars, 2006 14:52 
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Héros Initié
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Inscrit le: Dim 08 Août, 2004 15:32
Messages: 77
Localisation: Elfe
Merci.

Pour répondre, ce n'est pas l'histoire de mon perso. Ici, c'est plutot l'histoire d'un homme anonyme.
Mais je réfléchis à une suite, je ne sais pas encore si je vais l'écrire (du moins, si elle aura un intérêt).


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 Sujet du message:
MessagePublié: Dim 12 Mars, 2006 18:36 
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Héros Affranchi
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Inscrit le: Lun 06 Fév, 2006 11:36
Messages: 228
Azral a écrit:
Pour répondre, ce n'est pas l'histoire de mon perso. Ici, c'est plutot l'histoire d'un homme anonyme.


Ouf, j'ai eu peur! Je ne pensais pas qu'on te traitait comme ça dans l'[Alliance]! ^^

J'aimbe beaucoup ce que tu as écrit! ;) Continues!

_________________
Officier des Affaires Internes et Externes du Clan [Alliance].

^^

La meilleure boisson de Lordnor (merci CerberusXt)>>Image


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 Sujet du message:
MessagePublié: Jeu 16 Mars, 2006 13:28 
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Héros Ridicule
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Inscrit le: Mer 24 Nov, 2004 12:40
Messages: 15
Wahooouuuu, c'est super méga giga top Azral ! (comment ça je ne suis pas objectif ? ;-) ...)

Sinon on attend impatiemment la suite, j'ai quelques hypothéses mais je les garderai pour moi ....


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 Sujet du message:
MessagePublié: Dim 16 Avr, 2006 19:32 
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Héros Ridicule
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Inscrit le: Mer 01 Fév, 2006 20:52
Messages: 41
Localisation: sanctuaire
finalement j'ai pris le temps de tout lire et j'attend la suite, superbe texte


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