Forum Heroes' Chronicles

Hellismine, après avoir quitté L'Apocalyptique Train Chaotique des Ténèbres Abyssales, se remémorait le goût sucré des gaufres brûlantes, et s'entendait penser que si lire la vie était intéressant, la vivre procurait de douces félicités. C'était devenu l'une des raisons pour lesquelles le troll voyageait dans le Lorndor, découvrir les plus petites choses qu'offrait le monde, éprouver les plus intenses émotions ou expérimenter, encore et encore, la théorie que les livres lui avait dévoilée. Bien sur, il n'oubliait pas pourquoi il errait et combattait, pourquoi il devait accumuler de l'expérience et du savoir pratique. Pendant un moment, il repensa à Alaouros, sa laineuse et calme quiétude, à ses fantômes, à ses parents, à Park...
Hellismine marchait sur une route faite de sable et de petits cailloux, qui devait bien être pénible pour les montures, et arriva à une croisée où plusieurs panneaux indicatifs semblaient jurer que son chemin était le bon choix. Pourtant, l'un deux attirait davantage l'attention, d'un bois plus clair, d'une écriture plus sophistiquée, plus chaleureuse, invitait forcément à suivre la voie montrée. Mais ce qui attisait la curiosité, c'était ce que cette pancarte dénonçait : Le Pince-Cul.

- Quel nom saugrenu !!

Hellismine, fatalement, fut poussé par le désir de savoir. Il s'aperçut que trois petits vieux, assis sur une bancelle de pierre, un troll, un orc et un tauren, tous très agés donc, étaient en train de l'épier, comme si observer un voyageur choisir un chemin était l'un des loisirs du coin...

- Peut-être font-ils des paris...

Hellismine s'approcha d'eux, se retenant de pouffer en pensant à la réflexion qu'il venait de s'imposer.

- Messieurs, bien le bonjour, belle journée n'est-ce pas...
- Sur !, répondit le tauren avec le laconisme qui devait lui être caractéristique.
- Lequel d'entre vous pourrait me dire ce qu'est le "Pince-cul" ? Est-ce un village ?

Les trois fossiles se mirent alors à ricaner, d'un rictus fâné, et le troll répondit alors :

- Non, ptit gars, c'est pas un village... t'as pas une idée ?
- ben non... Une attraction ?

Une nouvelle fois, les vieux se mirent à rire, ce qui commençait légèrement à agacer Hellismine. Puis l'orc dit, entre deux démonstrations de gaieté :

- Ouais c'est ça... une attraction...

Hellismine, plus dans le flou que jamais, grogna à l'attention des trois moqueurs, qui se calmèrent aussitôt, puis prit l'option d'aller découvrir par lui-même quel était ce lieu qui l'intriguait tant. S'il s'était retourné, il aurait aperçu le vieil orc et le tauren donner des pièces d'or au troll âgé, qui, un large sourire aux lèvres, semblait railler ses compères. La route qui menait à ce "Pince-cul" était bordé d'arbres imposants, en fleurs, qui ne laissaient passer que par intermittence les rayons du soleil. Quelques cabanes fatiguées apparaissaient parfois au détour d'un virage, et un ru, où l'on voyaient quelques jeunes trolls et orcs pêcher venaient égayer la vision des passants. Enfin, au bout de ce chemin, voici que s'élève une maison majestueuse, très ornementée, aux couleurs relativement voyantes et aux volets repliés. Sur la porte, un panonceau : Le pince-cul, maison close.

- Enfin arrivé. Elle est drôle leur pancarte, on voit bien qu'elle est fermée leur maison. Qu'est-ce que cela peut bien être ?

La curiosité d'Hellismine était à son comble. Il regarda autour de lui, voulant interroger quelqu'un sur cette demeure, mais personne ne se trouvait dans les parages. Des bruits confus provenaient de l'intérieur, aiguisant encore l'intérêt d'Hellismine, qui, n'y tenant plus, tambourina sur la porte, se demandant comment il allait expliquer le fait qu'il ne savait pas ce qu'il faisait là. Au bout de deux minutes, on vint enfin lui ouvrir, une humaine d'un âge mur mais d'une beauté éteinte et saisissante, qui sourit en voyant le troll confus et verdissant.

- Entrez mon ami, désolé de vous avoir fait attendre.
- Euh ce n'est rien, madame, en fait, c'est la curiosité qui m'a pouss...
- Non, non, ne m'appelle pas "madame", je suis Claude...
- Hellismine...
- Quel physique !! Je suis heureuse d'avoir fait agrandir l'entrée...

Le troll se sentait désorienté par cette femme qui le poussait vers l'intérieur. De multiples senteurs affluaient vers ses narines, des odeurs veloutées, chaudes qui, s'il n'y faisait pas attention, l'endormiraient sans nul doute. Ils parvinrent à une grande salle, remplie d'énormes canapés, des tables et des chaises. On voyait des dames de toutes les races, de tous les âges, de toutes les beautés, qui discutaient avec des hommes aussi différents les uns que les autres. Au fond de la salle, un bar où de jeunes hommes semblaient amuser des elfettes à l'été de leur vie. Ce qui était assez surprenant, c'était cette preuve, une fois encore, que toutes les races pouvaient se rassembler sans s'entretuer. Ainsi, un orc paraissait raconter une bonne blague à une jolie naine qui gloussait telle une dinde de basse-cour, un vieux beau undead, entouré par les deux plus jolies gnomes qu'Hellismine ait jamais vu, semblait rajeunir à vue d'oeil, et l'on pouvoir observer un tauren, jeune et fort musclé, porter sur ses flancs, une gnomette réjouie. Les lumières étaient tamisées, l'ambiance ouatée et la musique d'ambiance aurait offusqué n'importe quelle oreille. Près du bar, un escalier en colimaçon, en bois noir, emmenait vers l'étage supérieur.

- Mais madame... Claude, quel est donc cet endroit ? Est-ce un magasin ?
- Eh bien !! D'où sors-tu ? Enfin oui, je crois, que l'on peut dire que je tiens un commerce ?
- Ah !! Et que vendez-vous donc ?
- Mais du bonheur mon chéri !! Et pas cher en plus, si tu le désires, pour cinquante pièces d'or, tu peux t'offrir un aperçu de ce que c'est, le bonheur !!!

Claude, d'un rire un peu gras au goût d'Hellismine, attira son nouveau client vers le bar où elle commanda deux boissons dont le nom biscornu échappa au troll.

- Je ne comprends pas, qu'entendez-vous par "bonheur" ?
- Ecoute, si tu veux le découvrir, tu sais ce qu'il te reste à faire...

Hellismine, à contre coeur, sortit sa bourse, hésita un instant, mais, encore et toujours poussé par cette curiosité malsaine, offrit les cinquante pièces à l'humaine, dont le visage s'éclaira comme un lever de soleil.

- Lucella !!!! LUCELLA !! Alors !!

Une jeune trollette apparut alors en haut des escaliers. Elle descendait maintenant les marches une par une, gondolant très légèrement des hanches, faisait onduler ses longs cheveux d'un mouvement fin de tête. Lucella était fort bien proportionnée, ce qui était relativement rare chez les trolls; beaucoup avaient les hanches trop larges ou avaient une poitrine trop généreuse. Elle, au contraire, était jolie, même si son visage avait été abondamment fardé, même si sa tenue vestimentaire était un peu trop colorée.

- Eh bien ma fille, où étais-tu ?
- Euh j'étais..
- Je te présente Hellismine. Il vient de s'acheter une part de "bonheur". Je veux que tu l'emmènes tu sais où afin qu'il puisse "toucher" son dû.

Ceci dit, Claude fit un clin d'oeil à Lucella, et cette dernière se fendit de son plus beau sourire, et offrit sa main au troll, telle une offrande aux dieux. Puis, entraîné par la belle dans les escaliers, Hellismine, désormais plus spectateur qu'acteur, ne put s'empêcher de jeter un dernier regard interrogateur à la tenancière.
Les deux trolls avaient maintenant atteint un corridor, prolongé par un long couloir aux tapisseries rouges. De nombreuses portes, qui portaient chacune un numéro, fermées, donnaient un sentiment de secret, de discrétion à la personne qui les voyaient pour la première fois. Lucella s'arrêta devant l'une d'elles, se tourna vers Hellismine, qui s'empourpra alors quelque peu, lui sourit encore une fois, et ouvrit la porte...


[hrp: me mettez pas trop dans le caca avec le sondage hein
Je signalerai que s'il n'a pas l'honorabilité de l'auberge du rêveur, le Pince-Cul reste un endroit à visiter, et je vous invite(au sens poli du terme hein je paierai pas les 50 PO à votre place) à aller remplir les poches de cette dame appelée madame euh... Claude
Le sondage ne durera qu'une semaine

Interdit, la main posée sur le chambranle vermoulu de la porte, Hellismine regardait la trollette gironde, qui, de ses doigts gracieux, l'invitait à entrer définitivement. A peine à deux mètres de lui, il put mieux la regarder. Elle était d'un vert-brun sucré, ses cheveux étaient plus foncés et semblaient doux comme un rideau de gaze rouge. Ses yeux, couleur de sang comme ceux d'Hellismine, étaient voilés, comme estompés par on ne sait quelle détresse et se mariaient d'une manière harmonieuse au sourire bleui, désenchanté, qu'offrait Lucella au troll. Son cou montait haut et surplombait un buste droit, bien charpenté, où tronaient, tels des montagnes sur une vallée aux milles merveilles, deux avant-coeur d'une rondeur calculée, deux orbes magiques sertis dans cette arme redoutée qu'est l'amour, que laissait paraître une robe légère, lourde de confidences et de promesses adultes.
Hellismine était parvenu à faire un pas, un seul mais il était décisif. Lucella passa derrière lui et ferma la porte. Pris au piège. Lucella le regarda longuement, profondément. Elle aussi semblait intriguée par cette masse de muscles qui paraissait assez niais, pas trop laid, qui semblait perdu.

- Qu'ai-je acheté ? , lacha-t-il dans un souffle...

Le troll, maintenant promenait ses pupilles affolées un peu partout dans la chambre. Tout n'était que tissu dans celle-ci, des tentures drapées servant à décorer les murs aux tapisseries d'une autre époque, d'un autre usage, et aux rideaux de velours jaune, cachant le jour. Des fauteuils imposants qui ne recevaient jamais le séant de quiconque, avaient l'air d'attendre une quelconque occasion de servir et un semainier vieillot rassemblait certainement les vêtements de la belle. Au milieu de ces quelques meubles, majestueusement mis en valeur, paradait un lit de chêne blanc, d'une facture plus qu'honorable, habillé d'un couvre-pieds en marceline mauve. Hellismine, quand il eut posé les yeux sur cette somptueuse couche, fonça de peau et détourna bien vite le regard de ce lieu si intime.

- Je crois que je ne suis...

Lucella ne laissa pas au troll le temps de finir sa phrase. Elle s'approcha de lui, lentement, le front en avant, se hissa sur la pointe des pieds et déposa un baiser sur les lèvres sèches d'Hellismine. On peut facilement penser que c'est à cet instant que ce dernier commença à comprendre, enfin, ce qui l'attendait dans cette pièce. Il eut un mouvement de recul, un faible moment où confondu, il ne put piper mot. Lucella recommença, plus longuement cette fois-ci, elle s'accrocha à son cou, comme si amoureuse, elle l'empêchait de se détacher d'elle. La saveur melliflue de la bouche de la trollette ota toute envie à Hellismine de se retirer, il participa à ce moment avec toute sa foi de découvreur du monde. Il la prit entre ses grands bras et la serra plus fort, tentant de rendre ce temps, cette seconde enivrante, inaltérable à jamais. Puis ils se décollèrent et Lucella, plus ensorcelante qu'elle ne le fut jusqu'alors, tourna sur elle-même la tête penchée en arrière et s'arrêta, net, et fixant ses pupilles sur celles du troll, défit les attaches de la robe diaphane qui la maintenaient habillée. Le coeur d'Hellismine frappait fort dans son thorax de tauren, ses mains tremblotaient, un peu, et ses jambes puissantes avaient perdu de leur belle assurance. Il parcourait ardemment des yeux le corps de celle qui allait être sienne, comme un voyage virtuel sur des contrées encore inexplorées. Puis il s'approcha, la main tendue comme la tendrait un mendiant de l'amour, et caressa l'épaule gauche de Lucella. Celle-ci se blottit alors contre lui, une nouvelle fois.

- Viens...

Elle l'entrainait maintenant vers le lit qu'elle défit d'un coup de main preste. Les deux respirations rapides se mêlèrent en une symphonie vocale. Tout en offrant à Hellismine ses lèvres humides, elle entreprit de lui ôter ses vêtements et ses armes, pendant que lui profitait de sa position pour faire découvrir à ses doigts, les rondeurs divines et délicates de la trollette. La chaleur que le corps de Lucella dégageait, lui emplissait le coeur d'émotion, et son odeur, une odeur éthérée de marais humide, de plantes d'eau et de fleurs des rivières, autant de fines fragances chères à ceux de leur race, parvenait à ses narines et endormissait ses sinus.
Finalement, ils se glissèrent dans les draps de reps blancs et se laissèrent aller à leurs envies, à ce plaisir des dieux, à la fusion des corps et des âmes qu'est l'amour physique.

- ... ma p'tite gôfre...

...

Pendant ce temps, Claude et un vieux gnome tout rabougri, discutaient de choses et d'autres quand un vacarme immense vint de l'étage, laissant tout le monde dans la grande salle pantois, figé, comme paralysés par l'évènement qui se produisait au dessus de leurs têtes.

- Ce n'est rien mon cher, c'est un troll qui vient de comprendre...

Le gnome sourit, puis à sa voisine :

- Oui, ces trolls, ils sont bien niais, mais une fois qu'ils ont compris...
- Ce bacchanal n'est pas sans me rappeler ce tauren, comment s'appelait-il déjà, qui...

...

Environ une heure après, Hellismine redescendit, l'air bête et le sourire au coin de la bouche, avec, à son bras Lucella, semblant heureuse, moins triste en tout cas. Il fit un signe de la tête en direction de la tenancière, lui indiquant qu'il allait partir. Sur le pas de la porte d'entrée, là où quelque temps auparavant la curiosité avait eu raison de lui, le troll, triste de devoir quitter celle qui, pendant quelques instants tout du moins, l'avait aimé du mieux qu'elle pouvait, dit quelques mots dans le creux de l'oreille de Lucella. Des promesses, de vains serments qu'il ne tiendrait jamais. Hellismine partit alors, convaincu qu'un jour, il retrouverait le chemin de ce lieu aux souvenirs indélébiles, puis se retourna et fit de grands signes à celle qui se tenait encore sur le perron.
Le temps avait changé, il faisait plus froid, quelques gouttes d'eau tombaient, et dans le coeur d'Hellismine, la chaleur de Lucella commençait déjà à laisser la place à la brise algide de la vie.