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Livre Quatrième
Suivi une grande période de calme où les Chevaliers purent se ressourcer. La défaite d'Irgul avait signé la fin de la présence démoniaque pour bien des siècles, et c'est sereinement que Valeyra et ses hommes se reposèrent[/i]
J'ai enfin le loisir de penser à autre chose qu'au combat. Les habitudes guerrières restent cependant, et les entraînement quotidiens nous gardent en forme. Je repenses à l'Ange. Depuis la venue d'Irgul, il ne m'est plus apparu. Il ne m'a plus jamais montré la voie. Peut-être estime-t-il que je suis devenue suffisamment expérimentée pour choisir la meilleure. Peut-être a-t-il confiance en moi, maintenant que j'ai achevé ma quête. Pourtant, c'est bien pendant ces années noires que j'aurais eu le plus besoin de lui...
L'Ange ne l'avait pas quitté. Il s'était seulement contenté de l'observer dans sa guerre contre son ennemi désigné, sans l'aider, sans faire pencher la balance. Et la victoire de sa protégée l'avait rempli de fierté... Un matin, il apparut dans la grande salle du castel, alors que tous les Chevaliers étaient attablés. Il leur annonça que bien qu'il soit de leur côté, il ne les avait pas toujours soutenu, et que la plus belle preuve de leur courage venait de lui être donné : même sans lui, ils avaient triomphé du plus grand des périls. Chacun avait entendu parler des visions de Valeyra, aussi personne ne s'étonna-t-il vraiment de l'apparition. Ce qui surpris davantage l'assemblée, c'est que l'Ange révéla son identité : il était Helmör, Dieu de la Magie. Et, comme récompense suprême pour ce qu'ils avaient accompli, il leur fit un cadeau inestimable : l'immortalité, la vigueur éternelle de leur corps.
Voir un Dieu s'incarner... N'y a-t-il pas chose plus magnifique ? Celui que je n'avais qu'aperçus dans des rêves, des visions, est venu, est apparut. Et ce cadeau... Je me sens rajeunie. Si la puissance magique conserve, que dire de la magie divine ? Mes muscles sont plus fermes qu'ils ne l'ont jamais été, mes sens plus affûtés que ceux d'un félin, et je sens le mana qui cours autour de moi, je sens les flux de l'énergie éternelle me parcourir... Mais, maintenant que notre croisade est accomplie, que faire de cette vie sans fin ?
Ces mots furent écris après le banquet. Peu de temps après, lors de la même soirée, Helmör s'incarna de nouveau, mais cette fois pour Valeyra uniquement. Il avait choisi la forme d'un homme, un humain magnifique, à la beauté presque irréelle. Car Helmör, à force d'observer cette humaine si particulière, de surveiller chaque instant de sa vie, était tombé sous le charme de l'Archimage... Chose surprenante pour un Dieu, mais chacun a ses faiblesses, aussi parfait puissent-ils sembler au commun des mortels.
Valeyra, comprenant la faveur qui lui était faite et tombant elle-même sous le charme de l'incarnation divine, accepta la volonté du Dieu. Ainsi s'unirent-ils, illuminant le palais entier de leur lumières jointes dans un amour unique.
Comment décrire ce qui n'a nul égal ? Non, je ne tenterais même pas. Ce serait dénaturer, pervertir cette chose si magnifique. Aimée d'un Dieu. Comment décrire cette folie ? Non, je n'essayerais même pas. Ce serait briser la magie de ces moments parfaits.
Livre Cinquième
La félicité de Valeyra et d'Helmör dura de nombreuses années. Des démons faisaient apparition, sporadiquement, mais jamais plus d'une fois par décennie, comme si Irgul avait été le dernier effort d'un créateur à l'agonie, qui avait dépensé ses dernières forces pour parachever son oeuvre la plus aboutie. Mais plus personne n'avait peur à présent. Les Chevaliers avaient redonné l'espoir, apportant la lumière sur tous ceux qui avaient vécu avec la terreur permanente du mal.
N'ayant plus d'ennemi ou presque, les habitant s du palais de lumière s'étaient renfermés sur eux-mêmes, retournant dans l'isolement, l'autarcie dont Valeyra les avait sorti pour accomplir leur quête. Ils ne virent pas les guerres embraser le monde. Ils ne virent pas les nations qui s'affrontaient, toujours plus organisées, toujours mieux préparées à se détruire entre elle. Oubliant les rêves de leurs protecteurs, elles s'abîmaient toujours plus dans l'ombre du chaos.
Un être, cependant, fini par attirer l'attention de l'Archimage. Sans pouvoir saisir de quoi il s'agissait, elle sentait qu'il ne s'agissait pas d'une créature normale. Elle avait quelque chose de plus, quelque chose qui lui permit de mener des pays entiers l'un contre l'autre, parfois d'un côté, parfois de l'autre. Comme dans une volonté d'annihiler, de détruire totalement ce que la vie avait pu créer d'intelligent en ces terres de nouveau dévastées.
Qui es-tu ? Que fais-tu ? Je ne comprends pas... Je ne te comprends pas. J'ai essayé de te suivre, j'ai essayé de savoir, mais une ombre plane sur ta vie, la nuit couvre ton existence. J'ai essayé de remonter le fil de ton passé, essayé de rêver de ce que tu as été, de découvrir tes origines. Les quelques images que j'ai pu voir m'ont fait pleurer. La seule sensation que j'ai pu partager... Cette douleur... M'a fait hurler. Qui que tu sois, je ne peux pas te laisser ainsi. Je vais partir à ta recherche. Et je vais te trouver.
Accompagnée de Chânt et de ses Chevaliers, elle voyagea pendant deux ans à travers le monde, à la poursuite de la créature qui vouait toute son énergie à le détruire. Elle le trouva au beau milieu d'une bataille opposant encore une fois des milliers de guerriers, au coeur d'une ville qui n'étais plus que ruines. Les Chevaliers détruisirent son armée affaiblie, puis ce fut à Chânt de l'affronter. Aidé par le pouvoir de Valeyra, elle-même soutenue par Helmör, il prit le dessus rapidement et plongea sa lame runique dans le corps de son adversaire. La lumière pénétrant dans le coeur de la créature des ténèbres l'atteignit plus profondément que n'importe quel acier, provoquant en elle une douleur insoutenable qui la plongea dans un long coma. Son corps fut ramené au palais, où Valeyra l'étudia pendant plusieurs années avant d'effacer la douleur et de le réveiller.
Pendant longtemps je t'ai observé... Et je me suis longuement interrogée. Maintenant, je sais... Je t'ai sorti de tes rêves. J'ai fouillé ton passé, partagé ta mémoire. J'ai vu... Et ensuite, je t'ai montré un visage serein. Mais toutes les nuits, tes rêves me frappent, ta douleur s'impose à moi... J'ai pleuré pendant des jours et des jours. Helmör m'a prévenu de prendre garde. Il sait d'où tu viens. Même s'il ne veut pas me le dire. Je sais qu'il n'y a pas que le monstre en toi. Je sais que je peux t'aider à retrouver ton âme...
Découvrant en cette créature un fabuleux potentiel, elle entreprit de le révéler, essayant de lui redonner une humanité perdue dans les flammes de la douleur depuis des siècles. Elle failli réussir, mais Malgr, désireux de nuire à Helmör, libéra la créature et l'obligea à se retourner contre celle qui l'avait recueilli A contrecoeur, la créature utilisa toute sa puissance retrouvée pour vaincre Valeyra, et réussi là où même Irgul avait échoué. Il en sorti lui-même brisé, ayant sacrifié tous ses pouvoirs pour vaincre. Puis il disparut...
Helmör ne le puni pas, car il ne put le retrouver, comme il ne put intervenir pendant le combat. Par la faute d'une puissance qui s'était interposée, il avait été impuissant. Lorsqu'enfin il s'approcha de son corps, il s'aperçut qu'elle n'était pas tout à fait morte. La vie qu'il lui avait donné, la puissance éternelle, l'avait sauvé, avait réussi à retenir une parcelle de son âme dans le corps déchiqueté. Une partie s'étant échappée vers le royaume des morts, il ne put la retenir, et fit la seule chose qui pouvait conserver ce qui restait de l'Archimage : il soigna son corps, puis l'enferma dans un cercueil de diamant, un cercueil à la mesure de l'amour qu'il lui portait : lumineux, magnifique, éternel. Désirant que personne ne puisse jamais le souiller, il le plaça là où mêmes les Dieux ne pouvaient voyager : l'entremondes, ce lieu mythique entre les plans, cet espace à la fois nulle part et partout.
Ce fut alors que les Fils de la Lumière revinrent. Envoyés à des lieues du palais pour détruire un démon un peu plus puissant que la moyenne, il avaient été incapables de protéger leur maîtresse. Furieux qu'ils se soient ainsi fait berné par Malgr, le Dieu les banni au Royaume des Ombres, car il ne pouvait pas leur retirer le présent qu'il leur avait fait. Ainsi devinrent-ils des Chevaliers damnés.
C'est ainsi que s'achève la Légende de Valeyra, la Dame Blanche, l'Archimage qui fit renaître l'espoir en Lorndor, celle qui triompha d'Irgul, celle qui fut aimée d'un Dieu. Celle qui fini par succomber par sa propre bonté...
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