Forum Heroes' Chronicles

Assaut nocturne



Non, mais quelle sales bêtes que ces brutes monstrueuses au faciès bovin et à l'œil éteint !

Mais laissez-moi donc vous conter la mésaventure qui vient de m'arriver.

J'étais en zone neutre, espérant rejoindre une partie de mon clan que je savais pouvoir retrouver pas très loin. Carn'Hibal et moi chevauchions allègrement parmi les petites fleurs des champs que je ramassais au passage pour me confectionner quelques potions. Ces fleurs étaient nombreuses, et le voyage s'annonçait donc selon des auspices plutôt bucoliques. Je n'avais d'ailleurs que fort peu de velléités de combat : à part pour donner le coup de grâce à un cerbère mal en point, par pure humanité, je n'avais pas sorti ma lame de son fourreau.

Aussi fus-je très surpris quand cet horrible petit nain, tout velu et rougeaud, aussi court sur pattes qu'un gnome de petite taille et large comme trois barriques, me sauta dessus en poussant un sonore :

- Crains l'ire de Kakachy, sinistre erreur de la nature !!!.

Aucune provocation de ma part ne pouvait expliquer cette action, c'est pourquoi je me fis surprendre. Après avoir essuyé une grêle de coups aussi explosifs qu'insensés, à la suite desquels mon adversaire resta là, bras ballants, à mes côtés, apparemment éreinté, je dus boire toutes mes potions pour me remettre en forme ! Puis je l'attaquai à mon tour, le laissant exsangue mais bien vivant : ma chevauchée, pour tranquille qu'elle fût, avait laissé des traces et Carn'Hibal comme moi avions besoin de nous reposer pour laisser le temps, lui à sa jambe arrière gauche, moi à l'intérieur de mon bras droit, de repousser. Mon bras manquant donc de force, je ne pus achever mon agresseur et je le laissai aller.

Après avoir dressé le camp pour la nuit, ma monture et moi prîmes une collation réparatrice. Puis la nuit commença, à peine dérangée par nos ronflements énergiques.

C'est alors, quelque part entre le coucher du soleil et son lever, que l'enfer se déchaîna. Je rêvais d'une sublime beauté brune qui me faisait des...

Bref. Là n'est pas la question.

Tout à coup, ce fut comme si une montagne me tombait dessus ! Impossible pour moi de faire quoi que ce fût pour me défendre ! L'être qui me tombait ainsi sur le poil, un tauren monstrueux dont on m'a dit depuis qu'il s'appelait Bruno, était si grand qu'il s'agissait certainement d'un géant, même pour ceux de sa race ! Musclé comme trois de ses semblables, le cuir plus épais que le crâne d'un nain, les cornes qui semblaient vouloir décrocher l'astre de la nuit, il me cognait à bras raccourcis avec sa dague. Tous mes efforts pour me défendre étaient systématiquement réduits à néant. Tout juste me montrai-je capable d'esquiver deux attaques, ce qui me permit quand-même de survivre à l'assaut.

Il me laissa pour mort sur le terrain, un bras tombé dans une fosse à purin, un autre suspendu au sommet d'un arbre, la jambe gauche boulotée par une araignée qui passait par là, la droite enfoncée dans ma cage thoracique.

J'avais aussi un léger mal de tête.

Je suppose que son dessein était de m'achever, mais il n'en eut pas le temps. Au petit matin, quand je revins à moi grâce à Carn'Hibal qui me léchait le visage de sa langue pourrie et soufflait son haleine fétide dans ce qu'il me reste de nez, je cherchai fébrilement le parchemin qui devait nous permettre de retourner en catastrophe à l'abri des murs de notre royaume.

Mais pourquoi faut-il donc que notre monde se trouve corrompu par ces hommes-taureaux monstrueux ?!! Puissent tous ces bovins rejoindre leur véritable source, ce bétail apathique et stupide dont nous nous nourrissions antan et qu'ils n'auraient jamais dû quitter !