Chapitre II
Doucement, je portais la cuillère à ma bouche. La soupe était brûlante, mais très bonne, et surtout pendant un hiver aussi glacial que celui-ci. Je bus lentement, dégustant la saveur. Devant moi, le jeune paysan me regardait avec un sourire paisible et niais.
'' Vous en voulez encore? Me demanda-t-il.
- Non merci, '' répondis-je poliment.
Je commencai à grignoter une tranche de pain.
'' Je vous remercie de votre accueil, vraiment, Revan.
- Ce n'est rien ! C'est un plaisir pour moi que d'héberger une jeune fille ''
Le jeune paysan me dévorait des yeux, avec son visage juvénile.
'' L'endroit est plutôt calme, contrairement aux rumeurs, dis-je.
- Quelles rumeurs? Vous voulez dire tous les ragots sur les démons ?''
J'acquiescai de la tête. Il rit.
'' Enfin, jeune damoiselle, n'ayez pas peur. Les Démons ont bel et bien envahis ces contrées, mais c'étaient il y a des decennies de cela.
- On raconte pourtant que l'entrée des Enfers Brûlants se trouverait dans les parages.
- Il y a fort longtemps, l'entrée des Enfers Brûlants s'y trouvait. Mais de grands héros ont vaincus les démons, et ont refermés le passage à jamais. Cette région est une province paisible et très sûre depuis.
- Vous connaissez l'histoire? ''
Revan eut un air gêné.
'' Oh vous savez, ce n'est pas un compte qu'on raconte aux enfants, ce genre d'histoire...
- J'ai dépassé depuis longtemps le stade de l'enfance.''
Enfin il se résigna. Je réajustais ma robe de couleur beige. Le décolté était plutôt très révélateur, et j'étais loin d'y être à l'aise. Si je m'étais vêtue de mes habituels atours noirs, on aurait fuit dès que j'aurais mis le pied dans ce village perdu.
'' Depuis la nuit des Temps, les Forces Infernales convoitent la terre. Mal incarné, leur but était la destruction, le sang... Se mesurer aux autres dieux et puissances n'était pas dans leur plan. Non, c'était les annihiler tous. S'établir sur terre et règner en maître était bien sûr l'un de leur projet. Mais leur foyer, les Enfers Brûlants se trouvaient à des millions de kilomètres sous terre, dans une dimension magique. Ils avaient crée pour cela, un portail démoniaque pour les téléporter directement sur place. Malgré leur puissance, les forces du bien réussirent à bannir les Démons et les renvoyer sous terres, anéantissant ce portail. La Mort ne capitulait pas si facilement. Bientôt ils découvrirent des endroits de la croûte terrestre qui présentaient une résistances bien moindre par rapports aux restes. Ils cherchèrent alors tous ces recoins, et y bâtirent en toute discrètion des passages qui remontaient à la surface de la terre. Et un jour, la Mort ordonna l'invasion. Les Hordes Infernales des Enfers apparurent de tous les coins de la planète, en semant mort et terreur. On dit que de grands forces s'allièrent ensemble aux côtés de puissances divines, et parvinrent à former la Résistance, qui vainquit, avec persévérance, plus d'un siècle plus tard. Ce siècle se nomma Les Temps Sanglants. Les passages furent à nouveau détruits. Sauf un, dit-on, le passage de l'Egorgeur.
Certains disaient que son existence n'était en aucun cas un danger, vu qu'il était scellé. Mais selon d'autres versions, on raconte que la présence de l'Egorgeur ne permettait pas la destruction du passage. Il paraissait que la porte était couverte du sang des héros qui scellèrent le tunnel.
Les Enfers ayant subi un échec cuisant, décidèrent de s'attaquer à d'autres proies plus prenables. Depuis on en entendit plus parler, si ce n'est que quelquefois l'apparition de Démon mineur quelconque. Mais aujourd'hui, c'est la Horde qui occupe les esprits. La vraie menace d'aujourd'hui. Aucune raison de s'inquièter des Démons, ceux-ci sont morts enterrés autant en réalité que dans les mémoires.
- Que savez-vous à propos de l'Egorgeur ? ''
Revan soupira. Il devait sûrement se demander quelle curiosité quelconque de ma part me donnait l'envie de connaître les démons.
'' Hé bien, l'Egorgeur est un Seigneur Démon, au même titre, que Phobos et Deimos. Vous savez qui sont Phobos et Deimos?
- Oui, oui..
- L'Egorgeur n'est que le surnom du Seigneur Astaroth, l'un des Démons Supérieurs les plus redoutés. Tout comme son surnom l'indique, Astaroth adore égorger ses victimes, puis baigner ses armes et atours dans leur sang, c'est d'ailleurs pour ça qu'il est toujours en rouge. C'est un grand général, chef d'innombrables légions démoniaques. On dit que ses quartiers se situeraient en dessous de l'ancien passage de cette ville, et que son domaine s'étendait jusqu'au passage, empli alors de sa puissance sanglante. Il porte deux lames incurvées avec lesquelles il s'amusent avec ses proies. Un démon à la puissance meurtrière...
- Et où se trouverait ce soi-disant passage?
- Enfin, mademoiselle..., fit-il, il n'existe pas!Ou en tout cas, plus depuis des centaines d'années! De nombreuses personnes sont venues enquêtées ici! Jamais personne n'a jamais vu une seule trace d'un quelconque passage! Je ne comprends pas votre intérêt vis-à-vis des démons. Bientôt ils deviendront des légendes oubliées.
- Je suis historienne '' expliquai-je.
Revan me regarda avec un air surpris.
'' Oui, je sais, ça peut surprendre les gens, mais je suis bien une historienne, et j'étudie la démonologie en ce moment. Qu'importe si il n'y a plus aucune trace de ce passage, j'aimerai juste venir, et pouvoir continuer mes notes. Vous savez, mon travail compte beaucoup à mes yeux. ''
Je feignit mon regard le plus aimable.
'' S'il vous plaît, Revan '', ajoutai-je.
Il semblait obsédé par mon regard, et capitula immédiatement.
'' Si vous y tenez tant, Shannon '' dit-il avec un sourire mieleux. Il déroula alors une carte sur la table. '' Là, près du bois, vous trouverez le soi-disant passage, ce n'est pas trop loin, mais un peu isolé. Alors jpeux vous accompagnez, ce sera plus facile.''
Je lui rendais son sourire.
'' Merci beaucoup Revan, mais je préfère être seule, c'est plus facile pour étudier. Vous me comprenez j'espère? Je ne voudrais pas que vous croyez que...
- Non, bien sûr que non. Mais pourquoi ne pas y aller demain? Nous sommes bientôt en pleine nuit, ce n'est pas le meilleur moment pour travailler.
- Oui, vous avez certainement raison, je vais aller me coucher.''
Je quittai la table rapidement, et montai les escaliers, sentant son regard dans mon dos. Quel naif! Ces pauvres mortels ne voyaient pas plus loin que le bout de leur nez. Une fois entrée dans la chambre, je fermai la porte, m'assurant que Revan n'approchait pas. Je saisis alors mon package, et déballai mes vrais vêtements que j'enfilai rapidement après m'être débarassée de la robe. J'ajustai mon manteau, et jetai la robe dans la poubelle.
Il était minuit. L'obscurité totale s'était emparée de la ville. J'ouvris doucement les fenêtres, et m'évadai dans la nuit profonde.