(Attention, je préviens, je ne m'inspire du Seigneur des Anneaux que pour rapporter le fait que les Symbelmynë poussent sur les tombes de rois. L'apparence des fleurs, et tout le reste de l'histoire sont totalement indépendants.)
Symbelmynë, Enfant des rois.
On raconte qu'il y a bien longtemps poussaient sur les tombes des rois d'un royaume aujourd'hui disparu, de petites fleurs dont l'aspect originel a été oublié, car en traversant les âges, elles ont changé maintes fois d'apparence. Ce qu'elles n'ont pas perdu, c'est leur forme simple, sans prétention.
Première Partie
I. Où il sera question de la naissance de Symbelmynë.
J'ouvre les yeux. A la vision d'un ciel chargé de nuages, j'en déduis que je suis couché sur le dos. Qu'est-ce que je fais là ? Je me redresse un peu trop vite, la tête me tourne. J'inspecte le décor qui m'entoure : plusieurs monticules de terre, je suis d'ailleurs assis sur l'un d'eux. J'ai l'air de sortir de nulle part, dans le plus simple appareil, et dans un environnement complètement inconnu : un champ de minuscules collines. J'y vois de petites portes, richement ornées. Je descends de mon perchoir, et je cherche la porte qui lui correspond. Une porte en bois, peinte en rouge et or... je l'ouvre, une odeur désagréable m'assaille. Une odeur de mort. Je me couvre le nez d'une main, et j'avance un peu plus loin sous terre. Au milieu de la petit pièce que j'y trouve, je distingue une forme humaine allongée dans la pénombre. Une armure, des armes et des décorations posées autour... c'est donc une tombe. Je ressors, m'emplis les poumons d'un air non vicié.
Que fais-je dans ce cimetière ? A qui appartiennent ces terres ? J'inspecte les tombes en quête d'indices qui pourraient m'aider à répondre à ces questions. Elles sont toutes différentes, et pourtant toutes semblables... Sur chacune d'elles, je distingue de petits points noirs. Je m'approche d'une tombe, et m'aperçois qu'il s'agit de fleurs. J'en cueille une et lève le bras pour l'inspecter sous la lumière du soleil. Elle est très étrange : bien que baignée par la lumière d'un soleil à son zénith, elle n'en renvoie absolument pas les rayons. Elle semble plongée dans l'ombre... Rien ne fait sa beauté, rien ne fait son charme. Et pourtant, je sens mon coeur qui s'emballe à sa vue.
- Une Symbelmynë, mon petit.
Je me retourne, aux abois. Un Elfe se tient là, à quelques pas de moi. Il me dépasse de plusieurs têtes, et il m'a appelé "mon petit"... Je suis donc un enfant. Mes yeux l'observent des pieds à la tête. Il est entièrement couvert d'un ensemble en cuir. Paré pour la guerre, semble-t-il. Et il tient une longue épée à deux lames à la main. Dans ma tête résonne le mot "Danger". Cependant l'homme ne s'approche pas de moi, au lieu de cela il s'assied contre l'une des tombes, à quelques pas.
- Cette fleur t'attire, n'est-ce pas ? C'est normal, après tout vous êtes très semblables. Tu as la peau aussi sombre que ses pétales.
A ces mots, je lève à nouveau mon bras au niveau de mes yeux. En effet, la différence est frappante, par rapport à la peau d'un blanc cadavérique de cet elfe. Je décide de parler à mon tour, et c'est une voix caverneuse qui sort de ma bouche, ce qui semble choquer mon interlocuteur.
- Me connaissez-vous ? Je n'ai aucun souvenir de cette vie. Qui suis-je ?
- Je ne sais pas d'où tu sors. Je ne t'ai jamais vu par ici... et ça ne m'étonne pas. On en voit peu de ta race à la surface.
- Ma race ?
- Tu es un Drow, répond-il en faisant une grimace de dégoût à la simple mention de ce mot.
- Un Drow.
- Un Elfe noir, une forme pervertie des Elfes blancs. Tes semblables sont sans foi ni loi, n'obéissent à aucune logique, à aucun ordre... Nul ne règne sur eux, car aucun d'eux n'a jamais réussi à imposer son pouvoir aux autres. Ils se terrent loin sous la surface, probablement ont ils assez de bon sens pour décider de nous épargner leur vue. Ils sont si pitoyables, un véritable troupeau d'animaux incontrôlables.
Je le laisse parler. Pourquoi m'offusquerais-je ? Je ne connais rien de "mon" peuple, je n'ai jamais vécu parmi eux, je n'ai jamais rencontré l'un d'eux. L'Elfe a remarqué que je ne réagissais pas à ses attaques verbales, et un sourire fend son visage. Il semble se détendre quelque peu, il relâche son étreinte autour de la garde de son épée étrange.
- Tiens donc, tu as l'air moins susceptible que les autres Drows... N'importe lequel d'entre eux m'aurait déjà attaqué à la moindre réflexion négative. D'où sors-tu ?
- Je vous l'ai déjà dit, je n'ai aucun souvenir de cette vie. Je n'ai jamais côtoyé d'autre Drow, pourquoi devrais-je vous faire ravaler vos paroles ?
- Très juste ! Dis-donc, pour un gamin, tu es bien mature ! Tu me plais bien, mon garçon... Je pourrais te former et faire de toi un grand guerrier, si seulement tu épousais la cause des Elfes plutôt que de rejoindre tes congénères sous terre... Qu'en dis-tu ?
- Je ne sais pas quoi vous répondre... je n'en sais pas plus sur votre cause.
Il part d'un grand éclat de rire puis rétorque :
- Tu en sauras plus bien assez tôt ! Alors, tu viens avec moi ?
Je reste silencieux un instant. Sa proposition a l'air tentante... Une éducation, un entraînement de guerrier...
- C'est d'accord. Emmenez-moi chez les Elfes.
- Tu as fait le bon choix ! Allons-y, suis-moi. Mon tigre nous attend un peu plus loin.
Il fait quelques pas, mais s'arrête soudain.
- Tu as un nom ?
- Aucune idée.
- Intéressant... un nom, c'est tout de même plus commode. On n'aura qu'à t'appeler Symbelmynë, dit-il avant de se retourner pour reprendre sa marche.
- Symbelmynë...
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